LA FONT DE SAINT-YENNE, Étienne, Lettre de l'auteur des Réflexions sur la peinture et de l'examen des ouvrages exposés au Louvre en 1746, s. l., s.n., 1747.
Editée chez Jean Néaulme, à La Haye, cette lettre est éditée concomitamment aux Réflexions sur quelques causes de l'état présent de la peinture en France. Avec un examen des principaux Ouvrages exposés au Louvre le mois d'Août 1746, dont elle entend être le justificatif.
Aude Prigot
- Lettre de l'Auteur des REFLEXIONS sur la Peinture, & l'examen des Ouvrages exposés au Louvre en 1746, p. 1
- Fautes à corriger dans les Réflexions sur la Peinture, n.p.
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QUOTATIONS
Je m'étois en quelque sorte attendu à ce dernier reproche de la part du Public, & il ne m'a point surpris. Mais je vous avouerai l’avoir beaucoup été à la lecture du Paradoxe que l’on s’est efforcé d’établir, Qu’il est absolument nécessaire de proffesser un Art pour en parler avec justesse, & oser en remarquer les défauts.
Ce n'est donc que dans la bouche de ces hommes fermes & équitables qui composent le Public, & qui ne tiennent aux Auteurs, ni par le sang, ni par l'amitié, ni par la profession, que l'on peut trouver le langage de la vérité. L'opinion que je combats est d'autant plus singulièrement étonnante, que ceux qui en sont les inventeurs la condamnent eux mêmes, en exposant toutes les années leurs Ouvrages aux jugemens du Public ; exposition qui ne seroit plus qu'un vain spectacle pour amuser sa curiosité & braver sa critique uniquement reservée aux gens de l’Art, & à leurs infaillibles Confreres. Je ne m'arrêterai pas davantage à réfuter sérieusement une opinion aussi nouvelle que dangereuse, & je penserai toujours que rien ne sçauroit être plus utile & plus important aux Arts comme aux Lettres, que les décisions du Public, lorsqu'elles pourront arriver jusqu'aux Auteurs, sans passer par l'organe perfide des adulateurs, ou par celui des admirateurs ignorans.
Mais je vous avoue en même tems les sentimens de douleur que m'a causé cette année-ci le déclin de nos Peintres d'Histoire, à l'exposition des Tableaux pour S. M. Douleur qui a été vivement augmentée par les plaintes du Public, tant de la stérilité, & du défaut de génie dans le choix des Sujets, que de la froideur & de la médiocrité dans l'exécution.
Seroit-ce dans celui que le Roi a nommé son premier Peintre, un manquement de zèle & d'ardeur pour exciter, & pour perfectionner les talens de ses Confreres ?
La Font souligne ici une des fonctions du peintre du roi: encourager l'émulation et le développement d'une école française de peinture.
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L'on sait que le Peintre inventeur & original est autant que le grand Poëte, susceptible de ce beau feu, de cet enthousiasme, auquel on ne commande point, & dont il faut attendre l'inspiration. Mais n'auroient-ils pas eu assez de loisir pour chercher des traits d'Histoire ou de la Fable plus intéressans & moins usés, ou qui n'eussent pas été traités divinement par nos plus grands Maîtres ? C'est en ce cas qu'un Peintre estimé, en repétant & en affoiblissant nécessairement par la répétition une pensée excellemment rendue, & au-dessus de laquelle il ne sauroit s'élever, tombe en ce moment dans le rang abject du Plagiaire, & an-dessous de son mérite personnel, par la comparaison. D'autant plus imprudent de lutter avec des Peintres du premier ordre, qu'il sentira moins l'inégalité de force dans le génie, & qu'il lui manquera cette impression naturelle du grand beau, & de ce pathétique qui frape & qui émeut par les mouvemens & les positions éloquentes de ses Figures. Son pinceau n'aura pas même la faculté de former ces phisionomies de caractére, qui donnent la vie aux Personnages, & les font parler à nos regards par leur noblesse, leur décence, & ce qui est bien essentiel, par le jeu des traits du visage relatif à leur rolle, & convenable à leur place. Enfin par cette expression d'ame & de sentiment qui doit suppléer à la parole, & sans laquelle tout Tableau d'Histoire n'est que de la toile & des couleurs.