DU BOS, Jean-Baptiste, Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture. Seconde partie, Quatrième édition revue, corrigée et augmentée par l’Auteur, Paris, Pierre-Jean Mariette, 1740, 3 vol., vol. II.
Du Bos était un érudit, amateur d’opéra, de musique, de théâtre et de peinture, qui a fréquenté les salons et voyagé en Hollande et en Angleterre. Il n’était pas praticien et à ce titre il justifie son propos de chercher à comprendre « l’origine du plaisir que nous font les vers et les tableaux » (Livre I, Introduction), légitimant de fait le droit de parler de peinture en se fiant uniquement à son expérience de spectateur. Cette approche fait ainsi du public un acteur essentiel de la critique et de la réception des œuvres. Du Bos oppose le point de vue du spectateur à celui des artistes qui ne s’attachent pas aux effets produits par l’œuvre, mais davantage aux contraintes posées par sa fabrication. Selon lui, ces effets doivent être dramatiques, identiques à ceux que procure une représentation théâtrale. Seule la peinture d’histoire, dont la vocation est de représenter les actions humaines et l’expression des passions, fait du peintre l’égal du poète ; ces deux derniers étant sans cesse mis en parallèle dans l’ouvrage. La valeur d’une œuvre dépend donc de son pouvoir émotionnel sur le spectateur, qui est essentiellement touché par la vraisemblance, et repose sur le plaisir qu’elle procure. Mais comment expliquer l’origine de ce plaisir ? Suffit-il qu’un tableau plaise pour qu’il soit bon ? Et que faire des peintures aux sujets jugés moins nobles ? Ce questionnement touche à la fois le degré de connaissance du public et les qualités de l’artiste. C’est la capacité du peintre à traiter un sujet de manière à la fois vraisemblable et inventive qui fait la force d’une œuvre. Dans la deuxième partie de ses Réflexions, Du Bos se penche sur le peintre et la question du génie. En faisant référence à Quintilien, il définit cette dernière notion comme une qualité innée et un talent reçu de la nature. À ces deux caractéristiques s’ajoutent les conditions particulières propres au climat et au régime politique qui ont un impact sur l’expression du génie. Du Bos introduit ainsi la théorie des climats pour définir le caractère de chaque individu, de chaque peuple : « c’est de tout temps qu’on a remarqué que le climat était plus puissant que le sang et l’origine » (Livre II, section 15).
L’ouvrage de Du Bos qui, selon Voltaire, était « le livre le plus utile qu’on ait jamais écrit sur ces matières » a eu un immense succès tout au long du XVIIIe siècle en raison notamment du développement des expositions, et a été édité à dix-sept reprises en France et à l’étranger.
Stéphanie Trouvé
DU BOS, Jean-Baptiste, Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Paris, J. Mariette, 1719, 2 vol.
DU BOS, Jean-Baptiste, Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture. Nouvelle édition, revuë et corrigée, Utrecht, E. Néaulme, 1732, 2 vol.
DU BOS, Jean-Baptiste, Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Paris, Pierre-Jean Mariette, 1733, 3 vol.
DU BOS, Jean-Baptiste, Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture. Cinquième édition, Paris, Pierre-Jean Mariette, 1746, 3 vol.
DU BOS, Jean-Baptiste, Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture. Sixième édition, Paris, Pissot, 1755, 3 vol.
DU BOS, Jean-Baptiste, Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture. Septième édition, Paris, Pissot, 1770, 3 vol.
DU BOS, Jean-Baptiste, Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, DÉSIRAT, Dominique (éd.), Paris, École nationale supérieure des Beaux-Arts, 1993.
LOMBARD, Alfred, L'abbé Du Bos: Un Initiateur De La Pensée Moderne (1670-1742), Genève, Slatkine Reprints, 1969.
TAVERNIER, Ludwig, « " A propos d'Illusion : Jean-Baptiste Dubos'Einführung eines Begriffs in die französische Kunstkritik des 18. Jahrhunderts " », Bruckmanns Pantheon, 1984, p. 158-160.
DÉSIRAT, Dominique, « Le sixième sens de l’Abbé Dubos », Revue La Licorne, 23, 1992 [En ligne : http://licorne.edel.univ-poitiers.fr/index.php?id=280 consulté le 10/10/2016].
DÉMORIS, René, « Peinture, sens et violence au Siècle des Lumières : Fénelon, du Bos, Rousseau », dans MATHIEU-CASTELLANI, Gisèle (éd.), La pensée de l'image : signification et figuration dans le texte et la peinture, Saint-Denis, Presses universitaires de Vincennes, 1994 [En ligne : http://www.fabula.org/colloques/document630.php consulté le 12/10/2015].
LICHTENSTEIN, Jacqueline (éd.), La Peinture, Paris, Larousse, 1997.
RUSSO, Luigi (éd.), Jean-Baptiste Du Bos e l'estetica dello spettatore, Actes de colloque, Palermo (Aethetica preprint : Supplementa), Palermo, 2005, 15.
LICHTENSTEIN, Jacqueline, « L’argument de l’ignorant : de la théorie de l’art à l’esthétique », dans MICHEL, Christian et MAGNUSSON, Carl (éd.), Penser l’art dans la seconde moitié du XVIIIe siècle : théorie, critique, philosophie, histoire, Actes du colloque de Lausanne, Paris, Somogy, 2013, p. 81-90.
LICHTENSTEIN, Jacqueline, Les raisons de l’art. Essai sur les théories de la peinture, Paris, Gallimard, 2014.
DAUVOIS, Daniel et DUMOUCHEL, Daniel (éd.), Vers l'esthétique : penser avec les "Réflexions critiques sur la poésie et la peinture" (1719) de Jean-Baptiste Du Bos,, Actes de colloque, Paris, , Paris, Hermann, 2015, 1.
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QUOTATIONS
ANONYME, Apollon du Belvédère, v. 130 - v. 140, marbre, h. 224, Vatican, Vatican, Museo Pio-Clementino, inv. 1015.
POUSSIN, Le Sacrifice d'Iphigénie
POUSSIN, Nicolas, La Mort de Germanicus, 1627, huile sur toile, 148 x 198, Etats-Unis, The William Hood Dunwoody Fund 58.28.
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ANONYME, Apollon du Belvédère, v. 130 - v. 140, marbre, h. 224, Vatican, Vatican, Museo Pio-Clementino, inv. 1015.
POUSSIN, Le Sacrifice d'Iphigénie
POUSSIN, Nicolas, La Mort de Germanicus, 1627, huile sur toile, 148 x 198, Etats-Unis, The William Hood Dunwoody Fund 58.28.
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Le sublime de la Poësie & de la Peinture est de toucher & de plaire, comme celui de l'Eloquence est de persuader. […] Un poème ainsi qu'un tableau, ne sçaurait produire cet effet, s'il n'a pas d'autre mérite que la régularité & l'élégance de l'exécution. Le tableau le mieux peint, comme le poëme le mieux distribué & le plus exactement écrit, peuvent être des ouvrages froids & ennuïeux. Afin qu'un ouvrage nous touche, il faut que l'élégance du dessein & la verité du coloris, si c'est un tableau […] y servent à donner l'être à des objets capables par eux-mêmes de nous émouvoir & de nous plaire.
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C'est à l'invention du Peintre ou du Poëte : c'est à l'invention des idées & des images propres à nous émouvoir, & qu'il met en œuvre pour exécuter son intention qu'on distingue le grand Artisan du simple manœuvre, qui souvent est plus habile ouvrier que lui dans l'exécution.
On n'examine pas long-temps les ouvrages des grands Maîtres, sans s'appercevoir qu'ils n'ont pas regardé la régularité & les beautez de l'execution comme le dernier but de leur art, mais bien comme les moïens de mettre en œuvre des beautez d'un ordre superieur.
Ils ont observé les regles, afin de gagner notre esprit par une vrai-semblance toujours soutenüe, & capable de lui faire oublier que c'est sur une fiction que notre cœur s'attendrit. Ils ont mis en œuvre les beautez d'exécution, afin de nous prevenir en faveur de leurs personnages, par l'élégance de l'extérieur, ou par l'agrément du langage. Ils ont voulu arrêter nos sens sur les objets destinés à toucher notre ame.
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Or il faut être né avec du génie pour inventer, & l'on ne parvient même qu'à l'aide d'une longue étude à bien inventer. Un homme qui invente mal, qui produit sans jugement, ne mérite pas le nom d'Inventeur. [...] Les regles qui sont déja réduites en méthode, sont des guides qui ne montrent le chemin que de loin, & ce n'est qu'avec le secours de l'expérience, que les génies les plus heureux apprennent d'elles comment il faut appliquer dans la pratique leurs maximes succinctes & leurs préceptes trop géneraux. Soïez toujours pathétiques, disent ces regles, & ne laissez lamais languir vos spectateurs, ni vos auditeurs.
Si cet enthousiasme divin, qui rend les Peintres Poëtes, & les Poëtes Peintres, manque à nos Artisans, s'ils n'ont pas, comme le dit Monsieur Perrault (a),
ce feu, cette divine flâme,
l'Esprit de notre esprit, & l'Ame de notre ame.
les uns & les autres restent toute leur vie de vils ouvriers, & des manœuvres, dont il faut païer les journées, mais qui ne méritent pas la consideration & les récompenses que les Nations polies doivent aux Artisans illustres. Ils sont de ces gens dont Ciceron dit : (b) Quorum opera non quorum artes emuntur. Ce qu'ils sçavent de leur profession, n'est qu'une routine qui se peut apprendre comme on apprend les autres métiers. Les esprits les plus communs, sont capables d'être des Peintres & des Poëtes médiocres.On appelle génie, l'aptitude qu'un homme a reçu de la nature, pour faire bien & facilement certaines choses, que les autres ne sçauroient faire que très-mal, même en prenant beaucoup de peine. Nous apprenons à faire les choses pour lesquelles nous avons du génie, avec autant de facilité que nous en avons à parler notre langue naturelle.
(a) Êpitre du génie à M. Fontenelle
(b) De Officiis lib. prim.
Il semble même que la providence n'ait voulu rendre certains talens & certaines inclinations plus communes parmi un certain peuple que parmi d'autres peuples, qu'afin de mettre entre les Nations la dépendance réciproque qu'elle a pris tant de soin d'établir entre les particuliers. Les besoins qui engagent les particuliers d'entrer en societé les uns avec les autres, engagent aussi les Nations à lier entre elles une societé. La Providence a donc voulu que les nations fussent obligées de faire les unes avec les autres, un échange de talens & d'industrie, comme elles font échange des fruits differens de leurs païs, afin qu'elles se recherchassent réciproquement, par le même motif qui fait que les particuliers se joignent ensemble pour composer un même peuple : le desir d'être bien, ou l'envie d'être mieux.
De la difference des génies, naît la diversité des inclinations des hommes, que la nature a pris la précaution de porter aux emplois, pour lesquels elles les destine, avec plus ou moins d'impétuosité, suivant qu'ils doivent avoir plus ou moins d'obstacles à surmonter, pour se rendre capables de remplir cette vocation. Les inclinations des hommes ne sont si differentes que parce qu'ils suivent tous le même mobile, je veux dire l'impulsion de leur génie.
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Il semble même que la providence n'ait voulu rendre certains talens & certaines inclinations plus communes parmi un certain peuple que parmi d'autres peuples, qu'afin de mettre entre les Nations la dépendance réciproque qu'elle a pris tant de soin d'établir entre les particuliers. Les besoins qui engagent les particuliers d'entrer en societé les uns avec les autres, engagent aussi les Nations à lier entre elles une societé. La Providence a donc voulu que les nations fussent obligées de faire les unes avec les autres, un échange de talens & d'industrie, comme elles font échange des fruits differens de leurs païs, afin qu'elles se recherchassent réciproquement, par le même motif qui fait que les particuliers se joignent ensemble pour composer un même peuple : le desir d'être bien, ou l'envie d'être mieux.
De la difference des génies, naît la diversité des inclinations des hommes, que la nature a pris la précaution de porter aux emplois, pour lesquels elles les destine, avec plus ou moins d'impétuosité, suivant qu'ils doivent avoir plus ou moins d'obstacles à surmonter, pour se rendre capables de remplir cette vocation. Les inclinations des hommes ne sont si differentes que parce qu'ils suivent tous le même mobile, je veux dire l'impulsion de leur génie.
Génie et talent sont liés au déterminisme climatique ; ils dépendent du lieu de naissance de l'artiste
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Je conçois que le génie de leurs Arts (ndr. : Peintres et Poëtes) consiste dans un arrangement heureux de leur cerveau, dans la bonne conformation de chacun de ces organes, comme dans la qualité du sang, laquelle le dispose à fermenter durant le travail, de manière qu'il fournisse en abondance des esprit aux ressorts qui servent aux fonctions de l'imagination. En effet l'extrême lassitude & l'épuisement, qui suivent une longue contention d'esprit rendent sensible que les travaux d'imagination font une grande dissipation des forces du corps. J'ai supposé que le sang de celui qui compose, s'échauffât ; car les Peintres & les Poëtes ne peuvent inventer se sang froid : on sçait bien qu'ils entrent en une espece d'enthousiasme. […]
Mais la fermentation du sang la plus heureuse ne produira que des chimeres bizarres dans un cerveau composé d'organes vicieux ou mal disposez, & par conséquent incapables de représenter au Poëte la nature, telle qu'elle paroît aux autres hommes. Les copies qu'il fait de la nature, ne ressemblent point, parce que son miroir n'est pas fidele, pour ainsi dire. […]
D'un autre côté, si ce feu qui provient d'un sang chaud & rempli d'esprits, manque en un cerveau bien disposé, ses productions seront régulières, mais elles seront froides. […]
Si le feu poëtique l'anime quelque fois, il s'éteint bien-tôt, & il ne jette que des lueurs. […]
Lorsque la qualité du sang est jointe avec l'heureuse disposition des organes, ce concours favorable forme, à ce que j'imagine, le génie poëtique ou pittoresque ; car je me défie des explications physiques, attendu l'imperfection de cette science dans laquelle il faut presque toujours deviner. Mais les faits que j'explique sont certains, & ces faits, quoique nous n'en concevions pas bien la raison, suffisent pour appuïer mon systême.
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Le génie est ce feu qui éleve les Peintres au-dessus d'eux-mêmes, qui leur fait mettre de l'ame dans leurs figures, & du mouvement dans leurs compositions
[…] L'expérience prouve suffisamment que tous les hommes ne naissent pas avec un génie propre à les rendre Peintre ou Poëtes : nous en voïons qu'un travail continué durant plusieurs années, plutôt avec obstination qu'avec persévérance, n'a pû élever au-dessus du rang de simples versificateurs. Nous avons vu de même, des hommes d'esprit, qui avoient copié plusieurs fois ce que la peinture a produit de plus sublime, vieillir le pinceau & la palette à la main, sans s'élever au-dessus du rang de Coloristes médiocres, & de serviles Dessinateurs d'après les figures d'autrui.
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La mécanique de la Peinture est très-pénible, mais elle n'est pas rebutante pour ceux qui sont nez avec le génie de l'art. Ils sont soutenus contre le dégoût par l'attrait d'une profession à laquelle ils se sentent propres, & par le progrès sensible qu'ils font dans leurs études. Les Eleves trouvent encore partout des Maîtres qui leur abregent le chemin. Que ces Maîtres soient de grands hommes ou des ouvriers médiocres, il n'importe, l'Eleve qui aura du génie, profitera toujours de leurs enseignements. Il lui suffit que ces Maîtres lui puissent enseigner une pratique, qu'on ne sçauroit ignorer, quand on a professé cet art durant dix ou douze années. Un Eleve qui a du génie, apprend à bien faire, en voïant son Maître faire mal. La force du génie change en bonne nourriture les préceptes les plus mal digerez. Ce qu'un homme né avec du génie, fait de mieux, est ce que personne ne lui a montré à faire. […]
CARRACCI, Annibale
LE BRUN, Charles
PERUGINO, Pietro (Pietro di Cristoforo Vannucci)
POUSSIN, Nicolas
RUBENS, Peter Paul
SENECA
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CARRACCI, Annibale
LE BRUN, Charles
PERUGINO, Pietro (Pietro di Cristoforo Vannucci)
POUSSIN, Nicolas
RUBENS, Peter Paul
SENECA
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CARRACCI, Annibale
LE BRUN, Charles
PERUGINO, Pietro (Pietro di Cristoforo Vannucci)
POUSSIN, Nicolas
RUBENS, Peter Paul
SENECA
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Le génie ne se borne pas à une simple sollicitation, pour obliger celui qui l'a reçu à se produire. Le génie ne se rebute point, parce que ses premieres impulsions n'auroient pas eu d'effet: il presse avec persévérance, & il sçait enfin se faire jour à travers l'inapplication & la dissipation de la jeunesse.
Tout devient palettes & pinceaux entre les mains d'un enfant doüé du génie de la Peinture. Ils fait connoître aux autres pour ce qu'il est, quand lui-même ne le sçait pas encore. Les Annalistes de la Peinture rapportent une infinité de faits qui confirment ce que j'avance. La plûpart des grands Peintres ne sont pas nez dans les atteliers. Très-peu sont des fils de Peintres, qui, suivant l'usage ordinaire, auroient été élevez dans la profession de leurs peres. Parmi les Artisans illustres qui font tant d'honneur aux deux derniers siècles, le seul Raphaël, autant qu'il m'en souvient, fut le fils d'un Peintre. Le pere du Georgeon & celui du Titien, ne manierent jamais ni pinceaux ni cizeaux, Leonard De Vinci, & Paul Veronése, n'eurent point de Peintres pour peres. Les parens de Michel-Ange vivoient, comme on dit, noblement, c'est-à-dire, sans exercer aucune profession lucrative. André Del Sarte étoit fils d'un Tailleur, & Le Tintoret d'un Tinturier. Le pere des Caraches, n'étoit pas d'une profession où l'on manie le craïon. Michel-Ange De Caravage étoit fils d'un Masson, & Le Correge fils d'un Laboureur. Le Guide étoit fils d'un Musicien, Le Dominiquin d'un Cordonnier, & L'Albane d'un Marchand de Soïe. Lanfranc étoit un enfant trouvé, à qui son génie enseigna la peinture, à peu près comme le génie de M Pascal lui enseigna les Mathématiques. Le pere de Rubens, qui étoit dans la Magistrature d'Anvers, n'avoit ni attelier ni boutique dans sa maison. Le pere de Vandick n'étoit ni Peintre ni Sculpteur. Du Fresnoy, dont nous avons un poëme sur la Peinture, qui a mérité d'être traduit & commenté par M. De Piles, & dont nous avons aussi des tableaux au-dessus du médiocre, avoit étudié pour être Médecin. Les peres des quatre meilleurs Peintres François du dernier siècle, Le Valentin, Le Sueur, Le Poussin & Le Brun, n'étoient pas des peintres. C'est le génie de ces grands hommes qui les a été chercher, pour ainsi dire, dans la maison de leurs parens, afin de les conduire sur le Parnasse. Les Peintres montent sur le Parnasse, aussi-bien que les Poëtes.
Les peintres dotés de génie ne l'ont pas hérité de leur père.
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Les peintres dotés de génie ne l'ont pas hérité de leur père.
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Les peintres dotés de génie ne l'ont pas hérité de leur père.
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Mathématiques.
ALBANI, Francesco
CARAVAGGIO (Michelangelo Merisi da Caravaggio)
CARRACCI, les
DA VINCI, Leonardo
DEL SARTO, Andrea
DE PILES, Roger
DU FRESNOY, Charles-Alphonse
GIORGIONE (Giorgio da Castelfranco)
IL CORREGGIO (Antonio Allegri)
IL DOMENICHINO (Domenico Zampieri)
IL TINTORETTO (Jacopo Robusti)
LE BRUN, Charles
LE SUEUR, Eustache
LE VALENTIN (Valentin de Boulogne)
MICHELANGELO (Michelangelo Buonarroti)
PASCAL, Blaise
POUSSIN, Nicolas
RAFFAELLO (Raffaello Sanzio)
RENI, Guido
RUBENS, Peter Paul
TIZIANO (Tiziano Vecellio)
VAN DYCK, Antoon
VERONESE, Paolo (Paolo Caliari)
Les peintres dotés de génie ne l'ont pas hérité de leur père.
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Le génie est donc une plante, qui, pour ainsi dire, pousse d'elle-même ; mais la qualité, comme la quantité de ses fruits, dépendent beaucoup de la culture qu'elle reçoit. Le génie le plus heureux, ne peut être perfectionné qu'à l'aide d'une longue étude. [...]
Mais un homme né avec du génie, est bien-tôt capable d'étudier tout seul, & c'est l'étude qu'il fait par son choix, & déterminé par son goût, qui contribuë le plus à le former. Cette étude consiste dans une attention continuelle sur la nature. Elle consiste dans une réflexion sérieuse sur les ouvrages des grands maîtres, suivie d'observations sur ce qu'il convient d'imiter, & sur ce qu'il faudroit tâcher de surpasser. Ces observations nous enseignent beaucoup de choses, que notre génie ne nous auroit jamais suggerées de lui-même, ou dont il ne se seroit avisé que bien tard. On se rend propre en un jour des tours & des façons d'operer, qui coûterent aux inventeurs des années de recherche & de travail. En supposant même que notre génie auroit eu la force de nous porter un jour jusques-là, quoique la route n'eut pas été fraïée, nous n'y serions parvenus du moins, avec le seul secours de ses forces, qu'au prix d'une fatigue pareille à celle des Inventeurs.
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Le génie est donc une plante, qui, pour ainsi dire, pousse d'elle-même ; mais la qualité, comme la quantité de ses fruits, dépendent beaucoup de la culture qu'elle reçoit. Le génie le plus heureux, ne peut être perfectionné qu'à l'aide d'une longue étude. [...]
Mais un homme né avec du génie, est bien-tôt capable d'étudier tout seul, & c'est l'étude qu'il fait par son choix, & déterminé par son goût, qui contribuë le plus à le former. Cette étude consiste dans une attention continuelle sur la nature. Elle consiste dans une réflexion sérieuse sur les ouvrages des grands maîtres, suivie d'observations sur ce qu'il convient d'imiter, & sur ce qu'il faudroit tâcher de surpasser. Ces observations nous enseignent beaucoup de choses, que notre génie ne nous auroit jamais suggerées de lui-même, ou dont il ne se seroit avisé que bien tard. On se rend propre en un jour des tours & des façons d'operer, qui coûterent aux inventeurs des années de recherche & de travail. En supposant même que notre génie auroit eu la force de nous porter un jour jusques-là, quoique la route n'eut pas été fraïée, nous n'y serions parvenus du moins, avec le seul secours de ses forces, qu'au prix d'une fatigue pareille à celle des Inventeurs.